Avec “Dérèglement”, je propose une forme visuelle et plastique du bouleversement climatique. À partir de mes photographies de paysages, je découpe l’image en bandes, que je décale selon un rythme volontairement dissonant.
Je traduis visuellement une Nature troublée, désalignée, en rupture avec son équilibre originel. Ce geste formel simple mais puissant fait apparaître un paysage fracturé, altéré, reflet symbolique des transformations profondes imposées par l’activité humaine.
Ce processus rend sensible ce que l’on peine parfois à percevoir : une Nature qui vacille, un monde en perte de cohérence. Chaque œuvre devient alors une métaphore tangible des tensions invisibles qui traversent nos territoires. Le dérèglement climatique n’évoque pas uniquement des phénomènes météorologiques parfois difficilement perceptibles : il transforme jusqu’à la géographie physique et visuelle du monde. Il agit en profondeur, jusqu’à redessiner les contours mêmes de notre environnement : recul des littoraux, fonte des glaciers, désertification, inondations et j’en passe.
Autant de transformations silencieuses que je choisis de traduire plastiquement, en décomposant l’image du paysage, en brisant son apparence tel un assemblage décomposé, disloqué, voire même parfois instable. Je questionne ainsi sur la fragilité de ce que l’on tient pour immuable. Ce travail fait écho à une vision dystopique de la Nature, comme celles développées par Enki Bilal dans sa série “Coups de sang”. Dans ses récits, la Terre blessée réagit en se métamorphosant, en “auto-sculptant” ses propres formes comme un cri organique.
Je donne ainsi naissance au témoignage de la Nature qui s’exprime à travers ces glissements, ces failles, ces lignes brisées.
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